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Introduction (Monique Bourin)
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Les Regards croisés de l'historien (Laurent Feller), l'économètre, l'économiste et l'ethnologue (Florence Weber). 
L' historiographie en Allemagne (Joseph Morsel), Angleterre (Chris Dyer), Espagne (Carlos Laliena Corbera)  et Catalogne ((Lluis To Figueras), Etats-Unis (Paul Freedman), France  méridionale (Monique Bourin), moyenne (Patrice Beck)  et du Nord (Ghislain Brunel), Italie (François Menant et Sandro Carocci]
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"Le marché de la terre" dans les régions de langue allemande
à la fin du Moyen Âge. Essai de bilan historiographique.
Joseph Morsel
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Une bibliographie silencieuse

L'examen de la bibliographie fait apparaître une germanophonie pour ainsi dire sans exception. Il existe en effet extrêmement peu de chercheurs français, anglo-saxons ou autres qui se préoccupent spécifiquement du problème de la circulation des terres et biens-fonds dans l'Allemagne de la fin du Moyen Âge 1. Il faut toutefois remarquer que les historiens de langue allemande ne paraissent guère s'être davantage intéressés au problème. L'examen primaire de la bibliographie en allemand à l'aide des instruments informatiques disponibles et de mots-clés spécifiques (Land, Grundstück, Landgüter, Landbesitz, Besitzpolitik, etc.) n'a absolument rien donné. L'examen des manuels classiques de l'histoire socio-économique 2 et de l'histoire agraire 3 n'est guère plus fructueux et le dépouillement des revues Zeitschrift für Agrargeschichte und Agrarsoziologie et Siedlungsforschung ne fournit rien d'autre que des remarques ponctuelles et "en passant". Apparemment, le thème n'a donc guère intéressé, ce qui impose de l'aborder de manière indirecte à travers la production historiographique.
Trois grands courants historiographiques ont été concernés par le problème : l'histoire de la noblesse, une des grandes spécialités outre-Rhin depuis le XIXe s., souvent traitée de manière monographique, qui réserve presque toujours un chapitre à la (sacro-sainte) Besitzgeschichte ("histoire foncière"), malheureusement souvent réalisée sans tenir compte des multiples biais de la documentation conservée - sur lesquels, il faut le souligner, la recherche n'a attiré l'attention que ces dernières années, dans le cadre des multiples travaux portant sur la Schriftlichkeit ("scripturalité") 4. Ces travaux fournissent en général des listes de biens achetés et des cartes. Un autre courant, souvent lié au premier, est celui de l'histoire de la crise agraire frappant les seigneurs, qui a occupé le terrain des années 1930 aux années 1970 et connaît une remise en cause croissante depuis les années 1980 5. Ces travaux documentent des transferts de biens des nobles vers les bourgeois et fournissent éventuellement des listes et des cartes. Enfin, un dernier courant est celui de l'histoire des relations villes/campagnes, très active dans l'ancienne R.F.A. à partir des années 1970 6, mais également importante pour les historiens de l'ancienne R.D.A. dans le cadre de leur problématique de la transition du féodalisme au capitalisme. Tous ces travaux insistent notamment sur les achats de terres par les bourgeois dans les campagnes environnantes et l'intégration de celles-ci dans la sphère du pouvoir économique et politique urbain.
On peut ainsi observer l'absence d'études villageoises, totalement négligées en Allemagne au profit d'une approche juridico-institutionnelle 7 et, plus récemment, politico-religieuse 8 des communautés villageoises. D'une manière générale, c'est l'étude de la Grundherrschaft ("seigneurie foncière") qui domine le terrain de l'histoire rurale, examinée sous un angle institutionnel (les types de droits et pouvoirs exercés) et territorial (les fluctuations du nombre de terres et bâtiments détenus). Les seules exceptions à cet état de fait sont des travaux parus ces dernières années en Suisse et qui, tout en adoptant le cadre d'une seigneurie pour des raisons documentaires (les sources sont produites au niveau seigneurial) entendent envisager la situation concrète et les comportements des ruraux, dans une perspective "vue d'en-bas"9.

2. Les sources utilisables

L'un des obstacles à l'appréhension des transferts fonciers est l'absence de sources notariales comparables à celles d'Italie ou même de France, bien qu'il ait existé des notaires publics au moins depuis les alentours de 1300 - mais ceux-ci ont émis des "instruments publics" volants, dont la conservation est semblable à celle des chartes, et non pas des registres notariaux. À Cologne, toutefois, les achats/ventes de terres et immeubles dans la banlieue, entre les murailles et la limite de la banlieue (matérialisée depuis le XIIIe s. par des bornes), relèvent des notaires de la ville et sont notées depuis le XIVe s. dans des Schreinsbücher ("livres scriniariaux") particuliers, dits extra muros ou extra civitatem, ce qui permet à Franz Irsigler de signaler la très grande mobilité, la très grande cherté et l'extraordinaire parcellisation (allant jusqu'à des divisions en tantièmes quand on ne pouvait plus diviser réellement) des vignobles et maraîchers dans cette banlieue, la quasi-absence des "paysans" parmi les détenteurs, qui sont pour l'essentiel des établissements ecclésiastiques urbains et des citadins, lesquels louent la terre à durée limitée à des ruraux ou artisans, souvent par l'intermédiaire de patriciens ou marchands qui servent de locataires/loueurs intermédiaires 10.
Les chartes de transaction (notariées ou non) ont longtemps été considérées comme un palliatif de l'absence de registres notariaux : pour Stralsund, p. ex., Konrad Fritze repère à l'aide des chartes "au total 109 achats privés de terres ou de rentes" entre 1370 et 1450 11 - mais il n'en dit pas plus sur les prix, les conditions, etc. Une utilisation identique s'observe pour toutes les études sur l'aristocratie qui consacrent une partie à la Besitzgeschichte. Toutefois, l'utilisation des chartes à cette fin a fait dernièrement l'objet de vives critiques de la part de Roger Sablonier, du moins pour les environs du XIIIe s.12 : se fondant sur l'ensemble du matériau conservé pour une région donnée, la Suisse orientale, R. Sablonier montre d'une part que le problème est moins celui de la conservation que de la mise par écrit, d'autre part que les biens mentionnés dans les chartes de vente ou de donation ne correspondent pas nécessairement à des biens effectivement possédés et dont on se dessaisit, mais à des biens que l'on s'approprie par le fait même que l'on prétende pouvoir s'en dessaisir 13. R. Sablonier considère ainsi les innombrables chartes de transfert comme autant d'actes qui prennent leur sens véritable dans des situations de conflit et appelle à ne pas confondre détention et prétention : les chartes sont fondamentalement des instruments de prétention sur des biens, dont le principe est de fonder implicitement une tradition, de faire comme si le bien était détenu librement et donc librement transférable. Partant de là, les ventes repérées par les chartes ne sont donc pas nécessairement à considérer comme des ventes effectives (au sens moderne, économiste, du terme), mais comme des actes d'affirmation au sein d'un groupe seigneurial ; leur sens ne réside pas dans le rapport entre vendeur et acquéreur mais entre le vendeur et ses proches (parents, amis, seigneurs, voisins) - et c'est dans ce contexte que doit être comprise la formation du "prix de vente".
Un cas particulier d'exploitation des chartes doit être ici mentionné : il s'agit d'une approche apparemment unique dans l'objet et la méthode choisis et qui ne paraît en tout cas guère avoir eu de postérité 14. Harald Kindl n'envisageait pas spécifiquement de travailler sur le "marché de la terre" mais s'intéressait à l'évolution du pouvoir d'achat de l'argent à Hildesheim et Goslar de 1150 à 1350. Pour ce faire, il a collecté dans les chartes de ces villes tous les prix mentionnés, qu'il a corrélés avec l'objet transféré, bien sûr, mais aussi avec la forme de transfert (achat/vente, concession en fief, engagement, affermage, taxation, amende, etc.). L'objet le plus fréquemment mentionné, et qui est le seul à se prêter à un véritable suivi chronologique, est la Hufe (le "manse"), dont 24 combinaisons sont mentionnées en fonction du mode de détention (alleu/fief/gage), de la provenance seigneuriale (tenures/réserve) et du mode de taxation seigneuriale (foncière/judiciaire). L'examen de la chronologie fait apparaître, comme résultats principaux : 1) une croissance continue et générale des prix de la Hufe jusque vers 1340 (malgré quelques variations de rythme et notamment une chute générale en 1300-1323, fluctuations que H. Kindl explique essentiellement par la conjoncture militaire) ; 2) l'absence de différence de prix en fonction du mode de détention (alleu/fief/gage) - qui suggère que cette distinction n'avait guère de pertinence sociale ; 3) le caractère déterminant, dans la formation du prix de la Hufe, de la taxation ou non par le seigneur, quel que soit le mode d'acquisition, la soumission ou non à la justice seigneuriale (plutôt qu'à celle du prince représentant l'empereur) n'intervenant que secondairement.
Un dernier type de source susceptible d'évoquer directement des transferts sont les registres de fiefs, car l'autorisation du seigneur était théoriquement obligatoire, à tout le moins son information a posteriori. Cependant, ces registres ne touchent qu'une partie spécifique des biens et couches sociales, ils ne commencent que tardivement (surtout aux XIVe-XVe s.) et ils ont été peu utilisés de ce point de vue : le gros travail d'habilitation, malheureusement non publié, de Hans-Peter Baum sur les registres féodaux des évêques de Wurtzbourg entre 1303 et 1519, appuyé sur l'usage poussé de l'informatique 15, représente une exception. Ce dernier met toutefois en lumière les limites de ce genre de source, qui n'évoque pas toujours (notamment au XIVe s.) le fondement de la resignacio (vente, échange, donation, arbitrage, etc.) et ne signale presque jamais les prix lors de ventes avérées. Dans ce cas précis, on peut ainsi seulement observer d'une part que le nombre global des transferts (par vente ou non) par registre connaît de fortes variations d'un registre à l'autre, sans qu'une tendance apparaisse, ce qui impose de prendre en compte également des variations au niveau de la chancellerie. D'autre part, on remarque que l'essentiel des transferts est réalisé au sein des catégories sociales concernées (retenues par les registres eux-mêmes) et non d'une catégorie à l'autre : les nobles vendent aux nobles, les bourgeois aux bourgeois, etc.16 - ce qui contredit en passant l'idée d'un transfert massif de biens des mains de la noblesse à celles des bourgeois.
À ces sources "directes" s'en ajoutent d'autres, susceptibles de révéler indirectement qu'il y a eu des transferts. Il s'agit en premier lieu des terriers ou censiers (Urbare, Zinsbücher, Beraine) : la série publiée des Urbare autrichiens fait apparaître p. ex. que des bourgeois détiennent dès le début XIIIe s. des terres en gage des princes territoriaux, aux côtés des nobles et de quelques juifs, et notamment des terres à vignes. Par ailleurs, le censier de l'abbaye autrichienne de Göttweig, du début du XIVe s., fait apparaître un grand nombre de donations de vignobles, parfois d'échanges, mais aucun achat. On trouve également dans les Urbare ou Gültbücher des commanderies teutoniques de Haute-Allemagne au XIVe s. la mention fréquente d'un hantlon ("Handlohn" = laudemium) à percevoir en cas de vente de terre par paysan. Les Urbare laissent subodorer que des pratiques plus ou moins importantes de vente, d'engagement, d'échange pouvaient avoir lieu, mais ne fournissent aucune évolution, aucun prix. Tout au plus pourrait-on rapporter le nombre de pièces de terres explicitement concernées par des ventes au nombre de pièces total... Il en va de même du Landbuch (terrier) de la Marche de Brandebourg, dressé en 1375 et fournissant une description extrêmement précise des terres et de leurs charges seigneuriales, mais sans indication d'éventuels transferts. Seule une comparaison de censiers ou terriers établis à quelques années de distance pour une même seigneurie permettrait de repérer de telles variations et d'en mesurer l'ampleur (sans toutefois connaître les formes et les prix de vente)17 - le problème se posant tout de même de repérer les éventuels liens existant entre deux détenteurs successifs portant deux surnoms différents : à partir de quand peut-on être sûr qu'il ne s'agit pas d'un père et d'un fils ? Ne peut-il s'agir d'un beau-père et de son gendre, donc d'une "banale" succession ?
Les rôles fiscaux (Steuerlisten) permettent également, par comparaison d'un relevé à l'autre, de suivre l'évolution de la détention du sol, mais ils sont principalement urbains et ne retiennent pas les terres aristocratiques ou cléricales. Une telle comparaison de deux rôles du XIVe s. concernant la ville de Göttingen livre cependant d'intéressantes informations, concernant la durée de détention des parcelles et surtout la circulation de parcelles au sein de groupes urbains spécifiques (d'une "famille" de conseillers à une autre)18, ce qui rappelle (à une échelle plus fine) ce qui a été observé par R. Sprandel et H.P. Baum du point de vue des fiefs wurtzbourgeois. Mais dans tous les cas, on ne connaît rien des formes de mutation : on ne peut guère que constater que le détenteur n'est plus le même. Le même problème se pose avec les obituaires (Jahrzeitbücher), dont M. Othenin-Girard a souligné la faible utilisation par les chercheurs : outre les fondations de messes, ils enregistrent les biens-fonds sur lesquels sont assises les rentes obituaires, mais aussi (par des ajouts, corrections, ratures, gloses marginales ou interlinéaires) les transferts de ceux-ci, permettant ainsi de suivre leur circulation au sein d'une communauté rurale. Mais ces sources ne datent généralement pas le moment du transfert (on doit alors "dater" l'acheteur à l'aide des censiers), n'indiquent pas toujours la forme du transfert, ne fournissent pas de prix de vente et ne sont utilisables de ce point de vue que pour les XIVe-XVIe s.
Si l'on tente de dresser un bilan des sources, on ne peut que constater d'une part que la documentation est très fragmentaire, ce qui fait dire à Dorothee Rippmann à propos des acquisitions des bourgeois bâlois dans les campagnes environnantes que "ce processus d'appropriation ne se laisse appréhender dans les sources que de manière fragmentaire"19. De la même manière, à propos du territoire de Nuremberg, Karl-Friedrich Krieger 20 reprend les soupirs de H. Dannenbauer, selon qui "ce serait une entreprise hasardeuse et sans espoir que de tenter de décrire l'histoire changeante de la propriété foncière de Nuremberg à partir des innombrables mentions isolées et transmises plus ou moins par hasard"21. Par ailleurs, cette documentation est relativement tardive : mis à part les chartes et, bien sûr, les polyptyques, l'essentiel des sources ne remonte pas au-delà du XIVe s. Un autre problème crucial posé par les sources (pas seulement allemandes !) est celui de l'absence de description précise des biens vendus : très souvent on se contente de mentionner qu'il s'agit d'un "bien" (gut) ou "petit bien" (gütlein), mais on n'est guère plus avancé lorsque le texte paraît préciser qu'il s'agit d'un "champ" (acker), d'un "clos de vigne" (weingarten) ou d'un "pré" (wiese), ni lorsque, dans le meilleur des cas, on recourt à la technique des quatre confronts - quelle que soit la forme et l'orientation de la pièce (il n'y a aucune raison pour qu'elles soient toujours quadrangulaires !).
Les sources sont ainsi rarement favorables à un suivi régulier, diachronique, des biens. Pour ce qui est d'une reconstitution synchronique (p. ex. le tableau à telle ou telle date d'un ensemble de parcelles), on manque apparemment la plupart du temps de prix utilisables. On sait ainsi que des transactions ont eu lieu mais on en connaît rarement la forme (achat, mise en gage, échange, etc.), le prix, le vendeur, l'objet, le contexte - et au-delà et en fin de compte le sens social de l'opération. Toutefois, il est clair également que l'information non sérielle est souvent négligée, comme des dossiers ponctuels qui permettraient d'accéder à des stratégies concrètes. Et même les données sérielles ne sont pas utilisées : les prix mentionnés dans les chartes n'ont guère été utilisés que par H. Kindl, les Schreinsbücher de Cologne constituent toujours un gisement de données largement inexploitées 22, des séries de censiers attendent certainement qu'un autre J. Demade se mette à leur recherche, de même qu'il a fallu attendre 1980 pour que les possibilités d'utilisation des rentes obituaires soient signalées par Léopold Génicot, et 1994 pour que M. Othenin-Girard s'appuie sur elles et sur les censiers pour coupler la variation des formes de détention de la terre avec un suivi nominal des détenteurs et faire apparaître ainsi de possibles stratégies familiales. On en reste ainsi largement, pour l'heure, à des approches et résultats impressionnistes que ne justifient pas entièrement les sources disponibles. Ce sont ces résultats que je vais maintenant essayer de synthétiser.

3. La place des achats/ventes dans les mutations

M. Othenin-Girard montre que les transferts de biens (Mutationen), de nature successorale ou non, au sein d'une même famille (identifiée par un patronyme spécifique, ce qui ne va pas sans poser au moins un problème méthodologique : l'hérédité des patronymes est-elle fixée ?) sont minoritaires par rapport à l'ensemble des "mutations" : ils représentent toujours moins de 50% des cas entre 1372 et 1538 dans la seigneurie de Farnsburg (environs de Bâle), avec une nette tendance à l'accroissement : 22% en 1372, 50% en 1538. Cet accroissement est interprété comme une fixation sur la "famille", elle-même signe d'une raréfaction des terres consécutive à la croissance démographique et donc à la difficulté pour les jeunes de se procurer des terres sur le marché "libre" (mais qu'entend-on par-là ?) : on ne transfère par conséquent plus ses terres à des étrangers mais on se limite aux enfants. La seule exception au trend à la hausse de la part intra-familiale des mutations confirmerait ceci : dans les années 1440, seuls 17% des transferts de terres le sont aux parents ; or cette période est caractérisée par de très nombreuses terres vacantes en raison d'une conjoncture de guerre, si bien que les jeunes ont le choix. En revanche, on ne sait rien du mode de transfert, aux "étrangers" comme aux parents, fautes de sources, et donc notamment de la part des achats/ventes par rapport à l'héritage : M. Othenin-Girard se contente ainsi de termes très vagues comme Gütertransaktionen ("transactions foncières"), zwischenbäuerliche Gütertransaktionen (idem "inter-paysannes"), Güterakkumulierung ("accumulation foncière"), Landerwerb ("obtention de terres"), et surtout Inhaberwechsel ("changement de détenteur"). Dans l'aristocratie, en revanche, les proportions sont nettement différentes : lorsqu'on dispose d'études à ce sujet, on a toujours plus de 50% des transferts de biens qui le sont à des porteurs du même patronyme 23. Toutefois, ces études ne différencient pas entre les différents types de biens transférés, si bien qu'il est parfaitement imaginable - mais il faudrait le vérifier - que les biens les plus importants (châteaux, dîmes, etc.) aient fait l'objet de transferts au sein des porteurs d'un même patronyme, tandis que les biens plus communs et facilement remplaçables auraient été aliénés vers l'extérieur.
Si l'on tient compte par ailleurs de l'extraordinaire développement en Allemagne de la pratique de l'engagère (ventes à réméré le plus souvent), qui constitue la forme absolument dominante des acquisitions tant chez les princes que dans la petite et moyenne aristocratie 24, on peut également poser la question de la part des achats/ventes "secs" par rapport aux engagères - bien que d'après les résultats obtenus par H. Kindl, la distinction n'ait sans doute pas grande pertinence. Le caractère temporaire de ces acquisitions doit toutefois faire réfléchir au sens social de ces achats : ce qui est en jeu n'est pas seulement une logique patrimoniale, mais plutôt un moyen pour l'aristocratie de s'approprier des fractions de terres de haute qualité sociale, des châteaux, etc., à quoi s'ajoute dans une mesure inconnue la pression princière sur les fidèles de bien vouloir prêter leur argent en prenant des gages, si bien qu'on voit l'aristocratie vendre des biens propres (terres...), voire les mettre en gage, pour pouvoir prendre en gage des biens princiers...25 On en déduit donc aisément que la compréhension des transferts particuliers n'est possible que par la prise en compte de l'ensemble des opérations et des rapports de forces qui les sous-tendent. Et cela confirme également à quel point la logique des transferts de terres n'est jamais réductible a priori à de l'économique : ce sont des instruments de pouvoir qui circulent, et pas seulement des châteaux-objets, des curiae-objets, des terres-objets, des vignes-objets, etc.
Tous les transferts ne faisaient d'ailleurs pas l'objet d'une circulation de monnaies (à laquelle on ne comprend d'ailleurs toujours pas grand-chose, il faut bien le souligner) mais s'inscrivaient dans une pratique d'échange. Mais à l'examen, on se rend compte qu'on a, finalement, très peu d'information sur cette pratique. Les études de cas portant sur l'aristocratie montrent en fait caractère très minoritaire par rapport aux achats ou prises en gage. Mais surtout, l'idée couramment avancée d'échanges réalisés afin de constituer des blocs compacts ("remembrement") ne semble pas trouver de confirmation dans la documentation. Dans un certain nombre de cas, ces échanges ne portaient d'ailleurs pas sur des terres, mais spécifiquement sur des hommes (notamment des serfs, en raison du contrôle strict que l'on prétendait exercer sur leurs unions matrimoniales), ce qui nous rappelle que derrière la représentation contemporaine du "remembrement" se cache moins la conception d'un espace cultivé homogène - et perçu comme un espace en deux dimensions - que celle d'un "espace social" caractérisé par un enchevêtrement des rapports sociaux, lui-même entretenu par des pratiques successorales et guerrières spécifiques, mais également par des pratiques de rééquilibrage périodique assurant une certaine cohésion au niveau seigneurial, évitant ainsi la pulvérisation définitive du système.
Si l'on considère enfin spécifiquement que les acquisitions de terres ont pu constituer un mode d'appropriation de fondements du pouvoir seigneurial (p. ex. des terres accensées), on doit alors également envisager le problème de la fréquence de cette pratique par rapport à celle des défrichements. Dans la région de Bâle, M. Othenin-Girard observe ainsi, après une phase de forte croissance des superficies exploitées par tenancier liée à la guerre au milieu du XVe s., à la fuite des exploitants et aux transferts de leurs exploitations (sans division) aux exploitants restants (qui y pratiquent l'élevage extensif jusqu'à fin XVe s.), un renversement de tendance vers 1500 : la croissance démographique aboutit à une baisse du nombre des grosses exploitations en raison des pratiques de division successorale. Dans ce contexte de demande de terres, toutefois, ceux qui ne sont pas des héritiers n'ont presque aucune chance d'accéder à la terre (sauf éventuellement par mariage, mais l'endogamie sociale apparaît très forte, dominée par une stratégie à long terme de concentration des terres - et non de patrimonialisation) : pour eux, l'obtention de terres se fait alors par le défrichement - mais là encore les proportions respectives nous échappent. Dans un autre contexte social, Rolf Kießling signale l'engagement de bourgeois d'Augsbourg dans les opérations de défrichement en Souabe au début XIVe s., à côté des établissements ecclésiastiques et des seigneurs laïcs. La raison de cet effort n'apparaît pas clairement : s'agit-il d'un moyen supplémentaire pour les bourgeois de s'approprier la terre ? Leur puissance pécuniaire est-elle encore insuffisante pour le faire par achat dans des proportions identiques ? Ou les terres achetables sont-elles insuffisamment nombreuses, à cause d'une faible commercialisation foncière ? 26. Le défrichement apparaît ainsi comme un moyen complémentaire, alternatif, d'obtention de terres, lorsque l'achat semble difficile, mais sans doute moins fréquent - ne serait-ce que parce que les bois et friches disponibles à la fin du Moyen Âge sont non seulement moins nombreux qu'aux périodes antérieures, mais surtout l'objet de réservations croissantes de la part des pouvoirs seigneuriaux ou, dans les zones alpines, des communautés d'habitants 27. Là encore, le défrichement ne peut donc pas être considéré comme une procédure technique, mais comme le résultat de négociations au sein de rapports de pouvoir.

4. Que vend-on lorsqu'on vend une terre ?

Vend-on la terre seule ? R. Sprandel considère la diffusion de l'argent dans les campagnes comme une "monétarisation de la propriété agraire et seigneuriale" induisant une "monétarisation des rapports de dépendance", qui forme par ailleurs le socle de l'indépendance urbaine vis-à-vis des seigneurs 28. Ce n'est donc pas seulement la terre que l'on vend, mais également le pouvoir seigneurial. Cependant, pour ce qui est également du nord de l'Allemagne, Inge-Maren Peters signale que la noblesse ne vend aux bourgeois (et à réméré) que le sol avec les prétentions à certaines redevances qui lui sont attachées, mais pas les droits seigneuriaux eux-mêmes, même lorsque, d'après le texte de la charte, tout le bien fait l'objet de la vente (on s'en rend compte en général à l'occasion de conflits postérieurs, lorsque l'on voit les anciens seigneurs continuer de revendiquer la justice. I.-M. Peters signale aussi le cas d'un achat à réméré d'un village par des bourgeois de Lübeck, au milieu du XIVe s., lors duquel les acheteurs se font explicitement garantir qu'ils ne seront pas tenus de ce fait de fournir, ni eux ni les habitants du village, l'aide militaire habituellement attendue) 29. L'achat d'une terre ou d'un village ne remettrait ainsi pas automatiquement en cause les rapports sociaux et introduirait même l'acheteur dans la situation sociale en question ; on ne pourrait de ce fait en aucun cas parler d'une pénétration des bourgeois dans la sphère seigneuriale dominée par la noblesse - et I.-M. Peters s'oppose par conséquent au postulat de R. Sprandel. Pour ce qui est de Nuremberg, toutefois, K.-F. Krieger estime que les réserves de I.-M. Peters ne sont pas valables et donc qu'on peut considérer, en Franconie, que les ventes de terres entraînent avec elles le transfert des pouvoirs seigneuriaux 30. Au niveau des exploitants, en tout cas, l'étude de H. Kindl confirme, si besoin était, que l'achat d'une Hufe soumise à une taxation seigneuriale entraîne l'endossement de la taxe par le nouveau tenancier. Pour ce qui est des transferts de terres d'exploitant à exploitant, Josef Hopfenzitz, étudiant certaines formules récurrentes dans les textes de Haute-Allemagne aux XIVe-XVe s. (des hofs gerechtigkeit ist... ; der hof sol haben...), signale que l'achat (ou la prise à ferme ?) d'une exploitation par un paysan en ne porte jamais sur la seule terre avec ses bâtiments, mais aussi tout un ensemble de matériels et d'animaux qui doivent statutairement s'y trouver 31. Il semble donc que les transactions puissent rarement porter sur la terre seule, indépendamment des droits seigneuriaux y afférents, l'exploitation rurale étant quant à elle (souvent ?) considérée avec ses infrastructures.
Ne vend-on pas alors aussi (et surtout) du statut social ? On peut observer avec Regina Görner une baisse constante, en Westphalie, du taux de rente entre 1350 (10,2%) et 1500 (5,3%), traditionnellement interprétée comme le signe d'une baisse des rentes (exprimées en monnaie) tirées de la détention de la terre, alors que les revenus tirés de capitaux prêtés (= le taux d'intérêt) restent supérieurs de quelques points 32. Mais Julien Demade a lumineusement fait observer que c'est exactement l'inverse qu'il faut comprendre 33 : le taux de rente étant mesuré à l'aide d'actes d'achat/vente qui mentionnent le prix payé (considéré comme "le capital") et la rente fixe qui sera servie à l'acheteur, la baisse du taux de rente signale alors que pour posséder une rente donnée et irrémédiablement fixée, on accepte de payer plus qu'auparavant : le prix de la rente augmente, donc le taux de la rente baisse. Or, dans le même temps, on voit les taux d'intérêt (donc la rentabilité financière du crédit urbain) se maintenir à un niveau plus haut et même s'accroître. On se trouve donc dans une situation où l'on préfère acheter chèrement quelque chose qui rapporte moins que ce que rapporte l'usage urbain de l'argent (la hausse des taux d'intérêt urbains étant d'ailleurs sans doute en partie un résultat de la raréfaction de l'argent sur le marché urbain). L'achat de terres ou même simplement de rentes seigneuriales ne peut ainsi pas être réduit à sa seule signification monétaire : ce qui est acheté, c'est une position sociale, celle de dominus. La transaction ne peut donc en aucun cas être réduite à son seul aspect matériel, qui n'est guère que le plus visible pour nous. La notion de "marché de la terre" ne doit ainsi pas oblitérer que la terre, d'une certaine manière, n'existe pas au Moyen Âge au sens où nous la concevons aujourd'hui : elle n'existe que dans le cadre de rapports sociaux précis (ce qui est d'ailleurs le cas encore aujourd'hui) et de représentations qui s'opposent à sa réduction à un simple instrument de production 34. Inversement, les résultats obtenus par H. Kindl montrent que la distinction entre alleu, fief ou autres formes de détention n'influe pas sur le prix, donc que ces distinctions formelles ont sans doute tout lieu d'être laissées de côté au magasin des accessoires inutiles 35 : ce qu'on achète n'est ni un alleu ni un fief, mais de la puissance sociale.

5. Les mobiles des mutations

Pourquoi alors vend-on ? L'endettement constitue une réponse habituelle. L'endettement seigneurial ramène à la théorie de la crise agraire chère à W. Abel (la contre-théorie de Guy Bois n'ayant eu outre-Rhin pour ainsi dire aucun écho 36), qui induit l'endettement seigneurial et interprète ainsi les nombreuses ventes et mises en gage. L'extension de la détention du sol par les bourgeois dans les régions périphériques de la ville est alors très souvent mise en relation avec l'appauvrissement de l'aristocratie féodale au XIVe s. (cf. K. Fritze, K.-F. Krieger, D. Rippmann, etc.). Toutefois, l'hypothèse de cet endettement est aujourd'hui largement remise en cause dans sa signification : on observe ainsi, comme on l'a déjà signalé plus haut, que des ventes ou mises en gage sont un moyen de se procurer de l'argent pour prendre en gage, ou prêter de l'argent à un prince, dans un contexte de circulation monétaire peu active 37. Les transactions se replacent ainsi dans un contexte social beaucoup plus riche... Et l'on observe d'ailleurs chez les détenteurs du sol nobles une nette tendance à la vente aisée de terres périphériques, venues soit par héritage, soit par achat occasionnel : une sorte de "volant de terres" servant de réserve de valeur (thésaurisation sous forme de terres) susceptible d'être revendues rapidement 38 - ce qui pourrait induire des formes plus souples de domination seigneuriale. Par ailleurs, la justification des ventes ou mises en gage à l'aide de l'argument des dettes pressantes commence à être remise en question, cet argument apparaissant nettement controuvé dans certains cas et sujet à caution dans les autres, car il paraît servir surtout à légitimer l'aliénation par rapport aux autres membres du groupe parental ou par rapport au seigneur 39. Enfin, la relecture de l'évolution du taux de rente par J. Demade confirme également que, même dans une région que le chanoine Werner Rolevinck a dotée d'une aristocratie pauvre et voleuse, la crise de la noblesse pourrait bien n'être qu'un discours convenu : en effet, ceux qui en début de période détiennent la plus grande partie des rentes vendables sont les seigneurs nobles ; ce sont donc eux qui contrôlent "l'offre", et son infériorité par rapport à la "demande" (puisque le prix d'achat des rentes baisse) signifie que la situation matérielle des nobles ne les contraint pas à vendre leurs droits...40
Mais il y a aussi l'endettement paysan : Jean Schneider soulignait ainsi l'importance de l'endettement paysan comme raison de la vente de terres, après que les ruraux ont tenté de compenser antérieurement leur besoin d'argent par la constitution de rentes auprès des bourgeois de Metz, ceux-ci mettant la main sur les terres dès que le débiteur ne pouvait plus rembourser ou payer la rente - ce qui conduisait d'ailleurs le plus souvent à des conflits avec les seigneurs de ces biens. Au XIVe s., les biens ruraux du patriciat messin constituaient ainsi la plus grande partie de sa fortune, et une base essentielle des activités de ces bourgeois, qui écoulaient leur production agricole vers la ville : Metz n'était en effet plus une grande ville commerciale, car à l'écart des grandes voies, mais seulement un grand marché local 41. De même, la paupérisation paysanne consécutive à la croissance démographique et à une pratique dominante de division successorale (dans région entre Meuse et Rhin inférieurs, on observe une croissance continue, entre la fin XIVe et le milieu du XVIe s., du nombre des petites exploitations paysannes payant l'impôt au duc de Clèves, par endroits de plus de 100%) aboutit à des ventes. Celles-ci sont réalisées soit auprès des détenteurs de plus grosses exploitations, dont l'existence matérielle n'était pas encore menacée par la crise et que de tels achats renforçaient, soit à des bourgeois. Ce sont ainsi 20% du sol laïc et non-noble qui appartiennent à des bourgeois à la fin XVe.42. Inversement, l'examen des comptes d'un bourgeois bâlois, Ulrich Meltinger, fait certes apparaître plusieurs créances sur des paysans des environs, mais rien ne permet de relier cette situation à la détention du sol par Meltinger que l'on observe par ailleurs (du moins D. Rippmann ne le signale-t-elle pas) 43.
Un autre mobile avancé est celui de la réorganisation seigneuriale, p. ex. pour les monastères rhénans envisagés par Edith Ennen 44 : dans le contexte dominant d'autarcie du haut Moyen Âge, les monastères mal situés avaient acheté des terres en vignes ailleurs, parfois loin de leur lieu d'implantation 45, terres qui devinrent, avec le développement des villes et des échanges, moins nécessaires alors que leur éloignement les rendait pénibles à gérer (en 1290, l'abbesse de Herford se plaint ainsi au sujet de biens situés de l'abbaye quod litones dicte curtis vinum nostrum et nostre ecclesie nimis inepte bibunt !) - d'où leur vente au XIIIe s. E. Ennen donne ainsi une liste de transactions des années 1210-1318 : les vendeurs sont des établissements ecclésiastiques, les acheteurs principalement d'autres établissements ecclésiastiques ou quelques clercs, suivis par des seigneurs laïcs (trois fois moins nombreux) et quelques rares bourgeois de Trèves et Cologne. Signe des temps historiographiques : aucun prix n'est signalé par E. Ennen. Christian Reinicke poursuit les remarques d'E. Ennen, donne quelques prix, mais sans permettre de comparaison ; il signale cependant la vente à un bourgeois colonais, en 1288, de deux curiae par le monastère Sainte-Marie de Soissons dans un village près de Cologne, où le dit bourgeois en tenait déjà une, "pour la forte somme de 300 lb.t.", ce qui pourrait laisser penser que ces 2 curiae revêtaient pour le bourgeois une grande importance, qu'a su exploiter le monastère 46.
À cela s'ajoutent des mobiles que l'on pourrait appeler "exogènes" par rapport aux rapports sociaux : pour la banlieue de Cologne, F. Irsigler signale ainsi sur la base des Schreinsbücher un fort renouvellement des détenteurs de terres (mais sans précision aucune) de banlieue vers 1349/50, à cause de la Peste Noire. Mais sous quelle forme le transfert a-t-il lieu ? Par ailleurs, M. Othenin-Girard souligne le rôle joué par l'âge dans les fluctuations du nombre des terres détenues, le maximum étant atteint à l'âge mûr, au moment où les enfants sont encore jeunes, avec une réduction ultérieure (au profit des enfants arrivant à leur tour à l'âge mûr) à mesure que l'âge et les besoins familiaux contraignent à/dispensent de travailler des surfaces moins importantes. La guerre peut également entraîner une mobilisation des terres, soit par la mort des exploitants, soit par leur fuite, comme M. Othenin-Girard l'observe dans la seigneurie de Farnsburg. Les troubles internes à Cologne dans les années 1396-1420 (mais on n'est plus là dans les contraintes "exogènes") provoquent également une série de mutations foncières en ville et dans la banlieue, lorsque les patriciens vaincus par les métiers quittent la ville.
Mais si l'on vend, c'est aussi qu'il y a des acheteurs, ce qui conduit à se tourner vers leurs propres mobiles. Les observations de M. Othenin-Girard sur le rôle de l'âge correspondent au mobile de l'extension des surfaces cultivées à partir d'une phase de jeunesse où les terres sont peu nombreuses (de fait, on peut observer qu'un certain nombre de petits tenanciers sont justement désignés comme "l'enfant de N.", donc comme jeune dont le père est encore vivant).
Un autre mobile avancé est celui du contrôle "politique". Il peut ainsi s'agir, pour R. Kießling 47, d'assurer la sécurité des routes marchandes, notamment, à Augsbourg, la route vers le sud (route d'Italie). La même chose est signalée par D. Rippmann pour Bâle : les routes importantes pour le commerce sont contrôlées par les bourgeois par l'achat des terres des villages voisins.
L'ostentation sociale des "nouveaux puissants" est également fréquemment mentionnée. C'est le cas pour les bourgeois arrivés au pouvoir à Cologne après le coup de force de 1397 : issus de régions plus éloignées, où ils conservent des biens et fondent des messes, ils se mettent très vite à acheter des terres à proximité de Cologne, comme "placement de capital" et moyen d'imiter l'aristocratie et le patriciat politiquement vaincu. Ces achats sont ainsi un moyen de sceller leur accession au pouvoir et de confirmer leur puissance 48. À Augsbourg, les bourgeois achètent des terres aux environs des villes dès la fin du XIIIe s. pour imiter l'aristocratie rurale, achats principalement réalisés auprès de l'évêque, mais aussi quelques autres établissements ecclésiastiques. Il ne faut cependant pas négliger, dans cette part du sol rural détenue par les bourgeois qu'une partie sans doute non négligeable remonte à l'époque où la famille était encore rurale 49. R Kießling signale en outre plusieurs cas de bourgeois de Souabe qui, devenus grands propriétaires, ont été amenés à développer des stratégies propres pouvant déboucher sur une opposition à la ville dans laquelle ils vivaient 50. F. Irsigler observe la même chose à Cologne, si bien que l'on voit parfois les villes intervenir pour maintenir les acquisitions de leurs bourgeois dans des limites raisonnables du point de vue de la qualité des biens achetés 51. L'achat de terres aboutit ainsi à aristocratiser effectivement le bourgeois, à finalement l'extraire de son milieu bourgeois et pose donc le problème de leur appartenance à la communauté urbaine. Mais surtout, il montre encore une fois que l'achat de terres ne peut seulement être considéré comme l'achat d'une substance : il met en jeu des phénomènes sociaux qui dépassent les acteurs de la transaction et modifient leur appartenance sociale (un peu comme si c'était la terre qui achetait le bourgeois...).
Les achats de terres ne représentaient cependant, pour les bourgeois enrichis, pas seulement un instrument de représentation, mais pouvaient aussi répondre à une recherche de lucre. L'exemple des Fugger pourrait en témoigner, quoiqu'il soit tardif : R. Mandrou avait en effet montré que les Fugger, qui avaient procédé à de nombreux achats au cours de la première moitié du XVIe s. en Souabe, l'avaient fait en connaissance de cause, à savoir que la rente foncière rapportait autant sinon plus que le crédit urbain 52. C'est aussi ce que pourrait indiquer la prise à bail par les bourgeois de terres qu'ils reconcédaient à leur tour à bail 53 : ici, la simple représentation ne suffit pas, le gain résiduel entre les deux baux paraît être la motivation principale (il faut d'ailleurs noter que cette addition de concesseurs de la terre aux paysans a signifié un alourdissement de la ponction sur le travail paysan). Toutefois, cet intérêt financier semble avoir été très variable d'une région à l'autre : dans la région de Nuremberg, le taux des rentes constituées sur les biens ruraux était de 3 à 5% milieu du XVe s.54, ce qui est peu par rapport aux 8 à 9% dans l'espace baltique à la même époque 55. K.-F. Krieger estime ainsi que l'intérêt économique seul ne peut expliquer l'attention des bourgeois de Nuremberg pour la terre : le prestige social et les terres détenues avant installation en ville sont très certainement à l'origine de l'important espace dominé par les Nurembergeois.
La terre aurait en outre représenté un "investissement sûr de capital" (sichere Kapitalanlage) pour les grands négociants (mais il faudrait alors prouver que, selon les opportunités, les grands marchands ont recapitalisés leurs terres). Au sujet de Bâle, D. Rippmann ajoute comme mobile l'investissement des fortes sommes que le seul marché urbain ne pourrait absorber - par l'achat de maisons ou autres immeubles. Mais l'achat de terres est aussi présenté comme un moyen de contrôle de la production de lin et du tissage de la futaine 56. Cette dernière observation impose toutefois de reconnaître que ce n'était donc pas seulement la terre que l'on achetait, mais également (et surtout) le travail de et sur celle-ci : c'était le moyen de peser sur le choix des espèces cultivées, de s'en approprier une part plus ou moins grande, mais aussi de faire travailler en outre une partie de la population rurale à la production textile (filature et tissage). De la même manière, en Suisse, l'animation des circuits commerciaux et la hausse de la demande en viande conduit les bourgeois de Fribourg à acheter des portions de terres alpines pour y développer l'élevage bovin 57 - c'est-à-dire y faire travailler des éleveurs sous contrôle. Autour de Cologne, F. Irsigler observe une pression très forte sur la zone immédiatement périurbaine, plantée de vignes et de maraîchers destinés à alimenter le marché urbain. R. Kießling distingue par conséquent deux catégories de biens achetés : ceux qui circulent très vite et changent souvent de détenteurs, et ceux qui restent durant plusieurs décennies voire plus d'un siècle entre les mêmes mains 58. Les seconds apparaissent comme des éléments d'une stratégie sociale/seigneuriale (prestige, constitution de dots...) mais aussi économique (réserves de capital), tandis que les biens à faible durée servent de menue monnaie pour des opérations d'achat/vente ponctuelles - tout comme chez les nobles... N. Becker observe par conséquent, dans la basse vallée du Rhin, la constitution de groupements d'achat (Konsortien) pour l'achat de terres, composés de membres de plusieurs "familles dirigeantes" urbaines à l'instar des investissements du type des compagnies ou sociétés commerciale (N. Becker n'en dit cependant pas plus).

6. La formation des prix

Les indications, voire même les réflexions à ce sujet sont extrêmement maigres. Les pièces de terres achetées par les Fugger au XVIe s. et soigneusement repérées par P. Mandrou révèlent une énorme disparité des prix à l'unité de surface "qui doit correspondre à une extrême précision dans l'évaluation des terres, selon la disposition, la qualité, l'entretien, la distance du village." Mais on ne sait rien de plus précis à ce sujet. D'après H. Kindl, l'élément déterminant serait la taxation seigneuriale pesant sur l'objet vendu, et secondairement les droits de justice pesant sur lui. Mais dans ses recherches en cours, J. Demade observe pour un même bien des fluctuations extrêmement fortes d'une année à l'autre, qui ne s'expliquent ni par les variations monétaires ni par la valeur, au regard des prix agricoles, de la récolte envisageable sur la terre en question. On peut envisager que la capacité du détenteur et de l'acheteur à négocier plus ou moins bien intervienne, mais aussi d'éventuels liens sociaux les reliant par ailleurs, selon le modèle que Giovanni Levi avait développé. En tout cas, on ne dispose pas pour le moment d'informations suffisantes sur ce problème.
Il semble toutefois que la proximité de la ville jouât à la hausse : autour de Cologne, la zone immédiatement périurbaine, plantée de vigne et de maraîchers, est soumise à une très forte demande, les sources colonaises indiquant que le prix de la parcelle de vignes vaut 4 fois celui de la parcelle de champs 59. À Bâle, les seigneurs qui détiennent les terres proches de la ville profitent de la haute attractivité liée à la situation desdits biens non pour augmenter le loyer ou la rente mais pour limiter la durée de concession (3, 6, 9 ans) afin de multiplier les occasions de lever un droit d'entrage (honorarium). De fait, on observe une circulation rapide des biens dans la banlieue (p. ex. ceux de la collégiale régulière St. Léonard) 60. R. Kießling, quant à lui, observe une disposition concentrique des terres des bourgeois autour des villes, avec quelques trous correspondant aux zones forestières (délaissées) et quelques concentrations plus nettes dans les secteurs traversés par des grandes routes 61. Logiquement, la proximité des routes commerciales joue également à la hausse 62. Mais en aucun cas on n'a d'études poussées ou un tant soit peu précises sur ce sujet : on en reste purement et simplement à des observations générales ne dépassant pas le stade de la corrélation plausible.

7. Bilan et perspectives

Que le thème des transferts de terres doive être envisagé de manière beaucoup plus sérieuse qu'il ne l'a été jusqu'à présent apparaît ainsi indispensable à la fois pour rendre compte des milliers d'actes dressés à cette occasion et qui n'ont finalement été qu'effleurés, qui plus est à l'aide d'instruments analytiques inadéquats (réduisant la terre à une surface plus ou moins cultivée), et en raison des effets non négligeables qu'ont parfois pu avoir des ensembles de transactions foncières sur le paysage rural (donc le "paysage social") : Manfred Balzer a ainsi montré que l'achat des terres des environs par les habitants de Paderborn à la fin du XIIIe et au début du XIVe s. et leur exploitation (en faire-valoir direct ou par affermage : les mentions se multiplient de bourgeois comme exploitants de terres des environs) à partir de la ville ont abouti à l'abandon progressif de tous les lieux habités des environs (ce qu'on appelle Ortswüstungen "villages désertés", par opposition aux Flurwüstungen, "terres désertées"). Le développement urbain de Paderborn et le processus de mobilité commerciale des terres apparaissent ainsi comme des facteurs de "désertion", ce qui se traduit par une "couronne de désertions" autour de la ville, laquelle prend certains traits d'une agroville 63. Pareillement, F. Irsigler estime qu'"à l'aide des Schreinsbücher extra muros on peut d'une certaine manière suivre la transformation de la couche supérieure de la ville de Cologne durant les siècles de la fin du Moyen Âge et du début de l'époque Moderne. Une entreprise de recherche tout autant payante serait l'analyse à long terme de la taille des parcelles, des prix d'achat, la hauteur des baux d'affermage et la fluctuation de la propriété". Ce programme de recherche n'a toujours pas, sauf erreur, été entrepris sur ces sources (le cas d'É. Champion sur certains Schreinsbücher intra muros étant d'ailleurs lui aussi exceptionnel).
La notion même de "marché de la terre" paraît toutefois, à la lumière des quelques informations disponibles, inadéquate pour l'espace germanophone (pour se limiter à celui-ci). La formation des prix fait entrer en jeu une multiplicité de facteurs comme la charge seigneuriale ou la position dans l'espace - donc théoriquement des données "objectives", mais auxquelles se surimposent selon toute vraisemblance des données totalement incontrôlables comme la capacité de bien vendre et de bien acheter, la qualité des personnes des deux côtés, les stratégies symboliques. Avant même de pouvoir parler de "marché de la terre", la première tâche sera d'éclairer la formation des prix des terres.



1 Nonobstant les remarques ponctuelles que l'on peut glaner ici ou là, au détour d'une page de travaux portant sur autre chose, on ne peut guère citer, sauf erreur, que des thèses de doctorat en cours, celle d'Étienne Champion (dir. M. Parisse, Paris I) et celle de Julien Demade (dir. G. Bischoff, Strasbourg II).
2 H. AUBIN, W. ZORN (dir.), Handbuch der deutschen Wirtschafts- und Sozialgeschichte, Stuttgart 1971, F.-W. HENNING, Deutsche Agrargeschichte des Mittelalters. 9. bis 15. Jahrhundert, Stuttgart : Ulmer, 1994.
3 W. ABEL, Agrarkrisen und Agrarkonjunktur. Eine Geschichte der Land- und Ernährungswirtschaft Mitteleuropas seit dem hohen Mittelalters, (3e éd.) Hamburg/Berlin : Parey, 1966 ; W. RÖSENER, Agrarwirtschaft, Agrarverfassung und ländliche Gesellschaft im Mittelalter, München : Oldenbourg, 1992 (Enzyklopädie Deutscher Geschichte, 13) ; du même, Bauern im Mittelalter, (3e éd.) München : Beck, 1987.
4 Cf. par exemple ceux de R. Sablonier, détaillés plus bas.
5 W. ABEL, Agrarkrisen..., op. cit. ; H.-P. SATTLER, Die Ritterschaft der Ortenau in der spätmittelalterlichen Wirtschaftskrise. Eine Untersuchung ritterlicher Vermögensverhältnisse im 14. Jahrhundert, Heidelberg : Diss., 1962. Sur la remise en cause de cette conception cf., en français, J. MORSEL, "Crise ? Quelle Crise ? Remarques à propos de la prétendue crise de la noblesse allemande à la fin du Moyen Âge", Sources. Travaux historiques 14 (1988), p. 17-42 et, dernièrement, K. ANDERMANN, "Raubritter - Raubfürsten - Raubbürger ? Zur Kritik eines untauglichen Begriffs", in : du même (dir.), "Raubritter" oder "Rechtschaffene vom Adel" ? Aspekte von Politik, Friede und Recht im Spätmittelalter, Sigmaringen : Thorbecke (Oberrheinische Studien, 14), 1997, p. 9-29, et H. ZMORA, State and nobility in early modern Germany. The knightly feud in Franconia 1440-1567, Cambridge : Cambridge U.P., 1997, p. 53-62.
6 R. KIESSLING, Die Stadt und ihr Land. Umlandpolitik, Bürgerbesitz und Wirtschaftsgefüge in Ostschwaben vom 14. bis ins 16. Jahrhundert, Köln/Wien : Böhlau (Städteforschung, A 29), 1989 ; W. RÖSENER, "Nouvelles recherches sur les rapports ville/campagne", BullMHFA 26/27 (juin/déc. 1997), p. 49-57 ; dernièrement, M. DREWNIOK, Das Busdorfstift in Paderborn : Wirtschaftsgeschichte eines westfälischen Kollegiatstifts im Mittelalter, Münster : Aschendorff (Geschichtl. Arbeit. z. westf. Landesf., 19), 1993.
7 O. von GIERKE, Das deutsche Genossenschaftsrecht (1868), réimp. Darmstadt, 1954 ; I. BOG, Dorfgemeinde, Freiheit und Unfreiheit in Franken, Stuttgart, 1956 ; K.S. BADER, Das mittelalterliche Dorf als Friedens- und Rechtsbereich, Weimar : Böhlau, 1987 ; du même, Dorfgenossenschaft und Dorfgemeinde, Köln/Graz : Böhlau, 1962.
8 P. BLICKLE, Gemeindereformation. Die Menschen des 16. Jahrhunderts auf dem Weg zum Heil, München, 1984, et les autres travaux de P. Blickle.
9 A. ZANGGER, Grundherrschaft und Bauern. Eine wirtschafts- und sozialgeschichtliche Untersuchung der Grundherrschaft der Prämonstratenserabtei Rüti (ZH) im Spätmittelalter, Zürich : Chronos, 1991 ; M. OTHENIN-GIRARD, Ländliche Lebensweise und Lebensformen im Spätmittelalter, Liestal : Verlag des Kantons Basel-Landschaft, 1994. Outre leur provenance de Suisse, ces deux travaux présentent une autre caractéristique commune et qui les distingue de l'essentiel des travaux d'histoire agraire en langue allemande : leur bibliographie véritablement internationale - certainement liée à ce carrefour linguistique qu'est la Suisse.
10 F. IRSIGLER, "Köln extra muros, 14.-18. Jahrhundert", Siedlungsforschung 1 (1983), p. 137-149.
11 K. FRITZE, Bürger und Bauer zur Hansezeit. Studien zu den Stadt-Land-Beziehungen an der südwestlichen Ostseeküste vom 13. bis 16. Jahrhundert, Weimar : Böhlau, 1976.
12 R. SABLONIER, "Schriftlichkeit, Adelsbesitz und adliges Handeln im 13. Jahrhundert", in : O.G. OEXLE, W. PARAVICINI (dir.), Nobilitas. Funktion und Repräsentation des Adels in Alteuropa, Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht (Veröff. d. Max-Planck-Instituts f. Gesch., 133), 1997, p. 67-100.
13 On retrouve ici une hypothèse formulée à plusieurs reprises par D. Barthélemy lorsqu'il attire l'attention sur les donations à l'Église de biens en fait contestés, les moines devant se débrouiller eux-mêmes pour garantir leurs prérogatives - la contrepartie en valeurs sociales (prières, monnaies) étant toutefois bel et bien accomplie.
14 H. KINDL, Die Kaufkraft des Geldes in Hildesheim und Goslar von 1150-1350, untersucht an den Grundstückspreisen. Ein Beitrag zur sachenrechtlichen (finanziellen) Geschichte des Lehenswesens im späten Mittelalter, Berlin : Diss., 1954. C'est Ludolf Kuchenbuch qui m'a signalé et procuré cet ouvrage multigraphié, ce dont je le remercie.
15 H.P. BAUM, Der Lehnhof der Bischöfe von Würzburg im Spätmittelalter, Würzburg : ms. Habil., 1990, notamment p. 118-122.
16 Phénomène déjà observé en 1984 par Rolf Sprandel dans son compte-rendu de l'édition l'un des registres de fiefs wurtzbourgeois : R. SPRANDEL, "Der Würzburger Lehenhof 1345-1372", Zeitschrift für bayerische Landesgeschichte 47 (1984), p. 791-794.
17 C'est précisément sur un corpus dense et régulier de terriers et censiers de l'hôpital du Saint-Esprit de Nuremberg que porte le travail de J. Demade susmentionné.
18 H. STEENWEG, Göttingen um 1400. Sozialstruktur und Sozialtopographie einer mittelalterlichen Stadt, Bielefeld : Verlag für Regionalgeschichte (Veröff. d. Inst. f. Histor. Landesforsch. d. Uni. Göttingen, 33), 1994.
19 D. RIPPMANN, Bauern und Städter : Stadt-Land-Beziehungen im 15. Jahrhundert, Basel/Frankfurt a. Main, 1990.
20 K.-F. KRIEGER, "Bürgerlicher Landbesitz im Spätmittelalter. Das Beispiel der Reichstadt Nürnberg", in : H.K. SCHULZE (dir.), Städtisches Um- und Hinterland in vorindustrieller Zeit, Köln : Böhlau (Städteforschung, A 22), 1985, p. 77-98.
21 H. DANNENBAUER, Die Entstehung des Territoriums der Reichstadt Nürnberg, Stuttgart, 1928.
22 La seule exception à ceci est représentée par le travail en cours d'É. Champion, présenté dans le Bulletin 33 (juin 1997), p. 31-39.
23 W. STÖRMER, "Grundherrschaften des höheren und niederen Adels im Main-Tauber-Raum", in : H. PATZE (dir.), Die Grundherrschaft im Spätmittelalter, t. 2, Sigmaringen : Thorbecke, 1983, p. 25-45 ; J. MORSEL, La noblesse contre le prince. L'espace social des Thüngen à la fin du Moyen Âge (Franconie, ca. 1250-1525), Stuttgart : Thorbecke (Beihefte der Francia, 49), sous presse.
24 Toutes les études régionales le confirment, du duché de Clèves de D. SCHELER ("Rendite und Repräsentation. Der Adel als Landstand und landesherrlicher Gläubiger in Jülich und Berg im Spätmittelalter", Rheinische Vierteljahresblätter 58 (1994), p. 121-132) à la Franconie de R. SPRANDEL ("Ländlicher Adel und interregionaler Zahlungsverkehr : ein Würzburger Beispiel von 1354", in : K. BORCHARDT, E. BÜNZ (dir.), Forschungen zur bayerischen und fränkischen Geschichte. Peter Herde zum 65. Geburtstag, Würzburg : Schöningh, 1998, p. 221-226).
25 R. SPRANDEL, "Ländlicher Adel...", op. cit. ; H. ZMORA, State..., op. cit. ; C. ULRICHS, Vom Lehnhof zur Reichsritterschaft. Strukturen des fränkischen Niederadels am Übergang vom späten Mittelalter zur frühen Neuzeit, Stuttgart : Steiner, 1997 (VSWG-Beihefte, 134) ; J. MORSEL, "À quoi sert le service de l'État ? Carrières, gains, attentes et discours dans l'aristocratie franconienne à la fin du Moyen Âge", in : Les serviteurs de l'État au Moyen Âge. XXIXe congrès de la S.H.M.E.S. (Pau, 1998), Paris, Publications de la Sorbonne, 1999 ; du même, La noblesse..., op. cit.
26 R. KIESSLING, "Bürgerlicher Besitz auf dem Lande", in : P. FRIED (dir.), Bayerisch-Schwäbische Landesgeschichte an der Universität Augsburg, Sigmaringen : Thorbecke, 1979, p. 121-140.
27 A. TIMM, Die Waldnutzung in Nordwestdeutschland im Spiegel der Weistümer, Köln : Böhlau, 1960 ; sur les espaces pastoraux de Suisse, cf. R. SABLONIER, "Innerschweizer Gesellschaft im 14. Jahrhundert. Sozialstruktur und Wirtschaft", in : Historischer Verein der Fünf Orte (dir.), Innerschweiz und frühe Eidgenossenschaft. Jubiläumsschift 700 Jahre Eidgenossenschaft, t. 2, Olten : Walter-Verlag, 1990, p. 83-178, ainsi que diverses remarques de P. MICHAUD-QUANTIN, Universitas. Expressions du mouvement communautaire dans le Moyen Âge latin, Paris, 1970.
28 R. SPRANDEL, Das mittelalterliche Zahlungswesen nach hansisch-nordischen Quellen des 13.-15. Jahrhunderts, Stuttgart, 1976. Cf. aussi G. LANDWEHR, "Mobilisierung und Konsolidierung der Herrschaftsordnung im 14. Jahrhundert", in : H. PATZE (dir.), Der deutsche Territorialstaat im 14. Jahrundert, Sigmaringen : Thorbecke (Vorträge und Forschungen, 14), 1971, t. 2, p. 484-505.
29 I.-M. PETERS, "Das mittelalterliche Zahlungssystem als Problème der Landesgeschichte", Blätter für deutsche Landesgeschichte, 112 (1976), p. 139-183.
30 K.F. KRIEGER, "Bürgerlicher Landbesitz...", op. cit.
31 J. HOPFENZITZ, "Hubgericht-Hofgericht-Hubrecht. Eine Untersuchung zum mittelalterlichen bäuerlichen Besitzrecht in Oberdeutschland", Zeitschrift für Agrargeschichte und Agrarsoziologie 24 (1976), p. 8-53.
32 R. GÖRNER, Raubritter. Untersuchungen zur Lage des spätmittelalterlichen Niederadels, besonders im südlichen Westfalen, Münster : Aschendorff (Geschichtl. Arbeit. z. westf. Landesf., 18), 1987. La baisse tendancielle du taux de la rente a, quant à elle, été observée ailleurs qu'en Westphalie, par exemple en Franconie (H.P. BAUM, R. SPRANDEL, "Die Erforschung von Lehensregistern in Verbindung mit der EDV. Ein sozialgeschichtliches Projekt der Universität Würzburg", Jahrbuch für historische Forschung 1980, p. 49-55) et dans les villes hanséatiques (H.P. BAUM, "Annuities in Late Medieval Hanse Towns", Business History Review 59 (1985), p. 24-48).
33 J. DEMADE, Champ économique et pouvoir noble. Mouvements des prix et revenus de la petite noblesse dans les pays d'Empire des XIVe-XVIe siècles, Paris : ms. mémoire de maîtrise (dir. C. Gauvard, Paris I), 1997.
34 Cf. les remarques-clés de L. KUCHENBUCH, Th. SOKOLL, "Vom Brauch-Werk zum Tauschwerk : Überlegungen zur Arbeit im vorindustriellen Europa", in : H. KÖNIG, B. von GREIFF, H. SCHAUER (dir.), Sozialphilosophie der industriellen Arbeit (= Leviathan, Sonderheft 11) 1990, p. 26-50.
35 Th. ZOTZ, "Zur Grundherrschaft der Grafen von Leiningen. Güterbesitz, bäuerliche Dienste und Marktbeziehungen im 15. Jahrhundert", in : H. PATZE (dir.), Die Grundherrschaft im späten Mittelalter, t. 2, Sigmaringen : Thorbecke (Vorträge und Forschungen, 27), 1983, p. 177-228, conseille déjà de négliger ces distinctions, que les sources médiévales elles-mêmes considèrent parfois explicitement comme secondaires.
36 Cf. toutefois l'analyse critique de P. KRIEDTE, "Spätmittelalterliche Agrarkrise oder Krise des Feudalismus?", Geschichte und Gesellschaft 7 (1981), p. 42-68.
37 R. SPRANDEL, "Ländlicher Adel...", op. cit. ; J. MORSEL, La noblesse..., op. cit.
38 J. MORSEL, La noblesse..., op. cit, et W. KOSSIN, Die Herrschaft Rheineck. Wirtschaftliche Grundlagen einer Adelsfamilie im 15. Jahrhundert, Köln/Weimar/Wien : Böhlau (Rheinisches Archiv, 134), 1995, font apparaître ce phénomène de vente prioritaire de terres périphériques.
39 J. MORSEL, "Adel in Armut - Armut im Adel ? Beobachtungen zur Situation des Adels im Spätmittelalter", in : O.G. OEXLE (dir.), Armut im Mittelalter, Stuttgart : Thorbecke (Vorträge und Forschungen), à paraître.
40 J. DEMADE, Champ économique..., op. cit.
41 J. SCHNEIDER, La ville de Metz au XIIIe et XIVe s., Nancy, 1950.
42 N. BECKER, Das Land im unteren Niederrhein, Köln/Weimar/Wien : Böhlau, 1992.
43 D. RIPPMANN, Bauern und Städter..., op. cit.
44 E. ENNEN, "Ein geschichtliches Ortsverzeichnis des Rheinlandes", Rheinische Vierteljahrsblätter 9 (1939), p. 255-275, Annexe "Veräußerungen grundherrlichen Streubesitzes im 13. Jahrhundert", p. 270-275.
45 Hypothèse déjà formulée par P. PIRENNE, "Comment les établissements religieux belges se procuraient-ils du vin au haut Moyen Âge ?", Revue belge de philologie et d'histoire 2 (1923), p. 643 sq.
46 Chr. REINICKE, Agrarkonjunktur und technisch-organisatorische Inovationen auf dem Agrarsektor im Spiegel niederrheinischer Pachtverträge 1200-1600, Köln/Weimar/Wien : Böhlau, 1989.
47 "Besitz...", op. cit.
48 Chr. REINICKE, Agrarkonjunktur..., op. cit.
49 R. KIESSLING, Die Stadt..., op. cit.
50 Ibidem.
51 Ibidem.
52 R. MANDROU, Les Fugger, propriétaires fonciers en Souabe, Paris : PUF, 1969.
53 F. IRSIGLER, "Köln...", op. cit., N. BECKER, Das Land...
54 K.F. KRIEGER, "Bürgerlicher Landbesitz...", op. cit.
55 K. FRITZE, Bürger und Bauer..., op. cit.
56 R. KIESSLING, "Besitz...", op. cit.
57 N. MORARD, "Les premières enclosures dans le canton de Fribourg à la fin du MÂ", Schweizerische Zeitschrift für Geschichte 21 (1971).
58 "Besitz...", op. cit.
59 F. IRSIGLER, "Köln...", op. cit. ; Chr. REINICKE, Agrarkonjunktur..., op. cit.
60 D. RIPPMANN, Bauern und Städter, op. cit.
61 "Besitz...", op. cit.
62 R. KIESSLING, Die Stadt..., op. cit. ; D. RIPPMANN, Bauern und Städter..., op. cit.
63 M. BALZER, "Spätmittelalterliche Wüstung und Stadtentstehung im östlichen Westfalen", Siedlungsforschung 12 (1994), p. 69-85.

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